L’accord de séparation entre Union Européenne et Royaume Uni

Signé le 24 décembre 2020, le nouvel accord de « commerce et de coopération » est entré en vigueur le 1er janvier 2021. Il parait que « le contrat de divorce » fait 1200 pages. Je ne les ai pas lues (d’autant qu’elles sont en anglais !)). Heureusement j’ai trouvé plusieurs sites qui reprennent les éléments les plus marquants, je les ai résumés ci-dessous.

1. Commerce

Il repose sur le principe du libre échange : pas de droits de douane ni de quotas dans les échanges de marchandises. Les entreprises de l’Union Européenne continuent d’accéder au marché des 66 millions de consommateurs britanniques et celles du Royaume-Uni aux 450 millions de consommateurs de l’UE. Mais à une condition : les entreprises britanniques doivent se plier aux règles et normes européennes (voir ci-après « Concurrence »).
Un contrôle aux frontières est institué, avec des déclarations d’importation et d’exportation. Ces déclarations vont évidemment renchérir le coût des échanges.

2. Concurrence

L’UE évite une concurrence déloyale à ses portes : en contrepartie de l’accès à son marché, le RU est soumis aux règles européennes en matière d’environnement, de droits sociaux, de fiscalité, de sécurité alimentaire, d’aides par l’État… Toutefois cet accord ne vaut que pour les règles actuelles, pas pour leurs éventuelles évolutions ultérieures . A noter quand même que, si un écart devenait trop important, l’une des parties pourrait réinstaurer des droits de douanes.

En cas de désaccord : Ce n’est pas la Cour de justice européenne qui tranchera (du fait d’un refus britannique). C’est un « Conseil de partenariat » composé de représentants de l’UE et du RU qui supervisera la mise en œuvre de l’accord. Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué…

3. La pêche

le RU reprend possession pleine et entière de ses eaux territoriales. L’enjeu est surtout symbolique mais il était très important pour les pêcheurs des 2 parties et a failli faire capoter la négociation.
Dans l’accord, les pêcheurs européens doivent renoncer à 25% de leurs prises dans les eaux britanniques. L’accord est conclu pour cinq ans et demi, ensuite le partage sera renégocié annuellement. Je n’ai pas trouvé de texte clair sur la période de transition et je suis preneur de vos éclairages.

4. Sécurité

L’accord prévoit le maintien de la collaboration des autorités policières et judiciaires dans la lutte contre la criminalité et le terrorisme.
Par contre le RU n’a pas voulu inclure les questions de politique étrangère, de sécurité extérieure et de défense. Il n’est donc pas envisagé de coordination dans ces domaines, ni de réponses communes.

5. Circulation des personnes

L’accord marque la fin de la libre circulation des Européens au RU, et inversement. Sauf pour les courts séjours, à condition d’avoir une carte d’identité ou un passeport.
Le changement majeur concerne les Européens souhaitant travailler au RU. Il leur faudra obtenir une offre d’emploi avec un salaire minimum annuel de 28.000 £, ceci afin de réserver les « petits boulots » aux travailleurs du RU.
Les Européens résidant au RU et les Britanniques en UE conservent leur droit de résidence et de travail.

6. Erasmus

Je rappelle que le programme Erasmus concernait d’abord les échanges entre étudiants, mais avait été étendu aux apprentis, enseignants, formateurs, etc.
Les bénéficiaires européens actuellement en échange Erasmus dans les universités britanniques (environ 150.000) peuvent terminer leur cursus, mais aucun nouveau programme ne sera engagé à la rentrée 2021. Ensuite ils devront s’acquitter de droits universitaires généralement très élevés (sauf accords négociés entre écoles ou universités). Ce point me parait particulièrement aberrant, le rapprochement entre les jeunes était à mon avis un des grands acquis de l’Europe.

6. Finance et biens immatériels

Les services financiers ne font pas partie de l’accord de libre-échange. la City est plutôt perdante et n’a plus la possibilité de vendre ses produits financiers librement dans l’UE. Des dérogations ont toutefois été accordées et des banques installées à Londres ont déjà créé des filiales dans plusieurs pays de l’UE (estimation de 7.500 emplois délocalisés sur les 500.000 que compte la City).

J’ai également lu que les sites internet situés au RU et ayant un nom de domaine en .eu ne pourront pas le conserver, sauf à migrer le siège du site en UE et d’accepter les règles européennes du RGPD (Règlement Général pour la Protection des Données). A l’inverse et pour échapper au RGPD, Facebook va transférer la gestion de ses données de l’Ireland aux USA.

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Dans l’ensemble, je trouve que les Britanniques s’en tirent plutôt bien. Certains de leurs avantages me semblent quand même des « victoires à la Pyrrhus » :

  • A quels prix le consommateur Britannique vat-il trouver ses produits, largement importés de l’UE, d’autant que la £ a perdu de sa valeur face à l’€.
  • Comment les pêcheurs britanniques vont-ils exploiter l’ensemble de leurs ressources halieutiques, sauf à renforcer considérablement leur flotte et investir, sans certitude d’augmenter leurs exportations en Europe.
  • Comment les métiers des « petits boulots » vont-ils être assurés, sachant que seuls les étrangers en acceptaient la faible rémunération (par exemple dans le domaine de la santé).

Par ailleurs les risques géopolitiques m’apparaissent considérables pour le Royaume Uni, sur deux points :

  • Les relations entre l’Irlande du Nord, maintenue dans le Royaume Uni (mais avec une frontière qui passe par le canal de Bristol) et l’Irlande, évidemment Européenne.
  • Les volontés sécessionnistes dès maintenant exprimées par l’Ecosse !

Par contre on peut aussi voir dans le départ des Britanniques une chance pour l’Europe : ils n’ont accepté d’y entrer que pour le seul « marché commun » et ont généralement torpillé toute avancée vers une plus grande intégration. C’est ce qu’avait bien perçu Michel Rocard dès 2014 : Amis Anglais, sortez de l’Union européenne mais ne la faites pas mourir !.
L’Europe qui se dessine sous l’impulsion de l’Allemagne et de la France, avec une solidarité financière nouvelle, laisse espérer un autre visage de l’Union que les Britanniques n’auraient jamais accepté.

Pour conclure, je ferais volontiers le pari que !es Britanniques, largement trompés par des leaders populistes (au premier chef Johnson et Farage, sans oublier Corbyn), vont regretter leur choix et que le référendum voulu par Cameron ne verrait plus la victoire du « Leave ».

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